joelle fiss  11 mai 2021

Le 4 mars 2020, j’ai déposé une question écrite au Conseil d’Etat sur l’éventuelle installation du Centre du roi Abdallah Ben Abdelaziz pour le dialogue interreligieux et interculturel (KAICIID) à Genève. Le centre a dû quitter Vienne, après des controverses— suite à un vote de la chambre basse du Parlement autrichien qui a appelé à sa fermeture en 2019.
 

 

Financé par le gouvernement saoudien, le KAICIID a le statut d’organisation intergouvernementale où d’autres Etats signataires sont associés (tels que l’Espagne et l’Autriche ou le Vatican qui y siège comme observateur). Depuis l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi dans les locaux du consulat d’Arabie saoudite à Istanbul, de nombreuses voix se sont élevées pour demander la fermeture du Centre de dialogue.

J’estime que ce serait une bonne opportunité pour la Genève internationale d’accueillir cette organisation qui pourrait placer le Canton au cœur du travail pour la réconciliation entre les peuples et le dialogue interreligieux et interculturel. Le centre pourrait jouer un rôle constructif placé au cœur du canton et des organisations internationales.

Or, l’ironie n’échappe à personne : l’Arabie saoudite continue à avoir un bilan néfaste en matière des droits humains fondamentaux – et en particulier dans le domaine d’expertise du centre : la liberté de religion ou de conscience.Si le KAICIID peut être, au regard de certains, un instrument de relations publiques pour améliorer l’image du Royaume, il n’empêche que ses projets pourraient permettre de potentielles avancées. En guide d’exemple, certaines réformes des manuels scolaires saoudiens[1]qui ont effacé de nombreux contenus répréhensibles, donnent une lueur d’espoir. Même s’il y a beaucoup de réformes à faire et des prisonniers de conscience à libérer[2].

J’ai interpellé le Conseil d’Etat en posant les questions suivantes :

Est-ce que le centre s’installera à Genève, comme il a été indiqué dans la presse ? A travers son service du protocole qui veille à garantir un accueil de qualité aux organisations internationales, le Conseil d’Etat peut-il négocier un mémorandum d’entente appelant les Saoudiens à s’engager à des réformes en matière de liberté de conscience ? Et afin d’éviter les controverses produites à Vienne (et d’encourager le soutien de l’opinion publique genevoise) ce mémorandum peut-il expliciter que le KAICIID respectera pleinement la liberté de religion ou de conscience sur sol suisse ?

J’ai reçu une réponse complète : pour l’heure, le Conseil d’Etat n’est pas en mesure de confirmer l’installation du centre à Genève. En réalité, il appartient à la Confédération de traiter ce dossier, puisqu’il s’agit d’une organisation intergouvernementale et traite des Affaires étrangères. Des discussions formelles n’ont donc pas été entamées. Si le Conseil fédéral devait souhaiter conclure un accord avec le KAICIID, et à supposer que l’organisation choisisse Genève comme siège, alors à ce moment là le Conseil d’Etat serait consulté, voire devrait donner son accord.  

Je continuerai à solliciter le gouvernement genevois s’il sera impliqué à l’avenir.

Voilà comment on prévient le salafisme sur sol genevois tout en œuvrant à la coopération internationale —au lieu de bannir le port du voile dans des référendums populistes!