joelle fiss  30 mars 2021

Avant, pendant et après les élections complémentaires qui ont amené à l’élection de Fabienne Fischer au Conseil d’Etat à Genève, l’on appelle à la droite de « s’unir ». En effet, 59% des électeurs du Canton ont voté pour des partis « de droite » mais c’est la candidate verte qui a finalement été élue. Or, qu’est-ce que ça veut dire être « de droite » et pourquoi l’alliance à gauche fonctionne-t-elle toujours mieux ?

Avertissement ! Je suis allergique aux termes « gauche-droite » mais pour me concentrer sur mes arguments, je vais simplifier et utiliser ce langage de façon (j’espère !) plutôt exceptionnelle.  

D’abord les cultures politiques entre la gauche et la droite divergent ; là où les électeurs de gauche sont généralement plus disciplinés, les élus de droite s’éparpillent de façon plus désordonnée. Par exemple, lors de votations, j’observe (très subjectivement) un phénomène identique: il est plus fréquent que des élus « de droite » désobéissent et/ou contournent la position officielle du parti—faisant même campagne dans le camp adverse– alors que ce cela semble moins fréquent du côté gauche.

Pourquoi ? Mise à part exercer publiquement son indépendance intellectuelle, d’abord en tant que citoyen, être de « droite » signifie des choses différentes pour chacun des 59% des électeurs genevois. Plus il y a des définitions de ce que c’est d’être « de droite », plus il y a des nuances. Plus il y a des nuances, plus il y a des désaccords. Et puis, plus il y a des désaccords, moins c’est facile de créer une grande alliance.

Prenons ne serait-ce qu’un échantillon spécifique de la droite que je connais le mieux : les libéraux-radicaux. Pour certains, cela s’articule principalement autour du libéralisme économique et un état présent pour les plus démunis. L’état n’est pas la solution à tout—mais il joue un rôle essentiel pour accompagner les genevois en difficulté. Concrètement, cela signifie quoi ? Baisser les impôts, rendre l’état plus efficace, réfléchir en termes d’indemnisations plutôt qu’en terme d’aides, soutenir les entrepreneurs, simplifier les procédures administratives, réconcilier l’économie et l’écologie et créer des nouvelles opportunités économiques face à l’urgence climatique. Or, il y a tout un tas de recettes politiques pour arriver à ces résultats. Baisser les impôts ? Oui, mais jusqu’à où? Soutenir les entrepreneurs par le biais de l’Etat? Oui, mais comment? Investir dans les nouvelles technologies ? Oui, mais sélectionner quelles priorités ? Les discussions sont vives et intenses.

Pour d’autres, le libéralisme-radicalisme politique prime ; c’est-à-dire défendre les valeurs libérales-radicales, encourager le multilatéralisme et la Genève internationale, promouvoir les accords commerciaux (notamment œuvrer en faveur des accords avec l’Union européenne), encourager la coopération internationale, dénoncer l’autoritarisme, promouvoir les droits fondamentaux.

Ces deux objectifs sont loin d’être mutuellement exclusifs—au contraire ! Mais voila des nuances déjà notées dans ce micro-cercle. Imaginez les différences plus généralisées entre d’autres partis!

Ajoutez à ceci les dilemmes moraux autour de l’affaire Maudet où il fut question de « valeurs » articulées dans chaque discours politique durant cette campagne si spécifique. Les pro-Maudet ont appelé au « pardon », à « l’unité de la droite » et pensent qu’il « est le meilleur ». Les anti-Maudet ont appelé à « défendre les institutions », « amener plus de sérénité » et à « lutter contre le mensonge». Tous les raisonnements utilisés ont encouragé chacun à justifier son vote (libre, au deuxième tour) comme il le souhaitait.

Certains PLR ont voté pour la PDC Delphine Bachmann qui incarne le mieux l’expression de  leurs valeurs. D’autres se sont abstenus dans le désarroi. Pour prendre un cas extrême, certains furent même prêts à voter UDC au nom de leurs « valeurs ». Donc, dans cette hiérarchie de valeurs, (c’est-à-dire empêcher Pierre Maudet d’accéder au Conseil d’Etat) il fut plus prioritaire que de soutenir un candidat souverainiste, anti-européen et qui dénonce une « dictature sanitaire » depuis la Covid.

En fin de compte, cette élection complémentaire fut un referendum sur nos émotions—et sur la hiérarchisation des valeurs de chacun. Aujourd’hui, l’heure est de revenir à la réflexion pour examiner s’il existe un petit dénominateur commun entre les 59% des voix du Canton pour élire un prochain exécutif. Pour cela, il faudra se poser des questions difficiles.

Pour caricaturer quel est lien commun entre un libéral-radical internationaliste et un UDC souverainiste? Pour un libéral-radical politique, aucun. Pour un libéral-radical économique, une alliance rationnelle pour maîtriser les finances de l’Etat. Comment les programmes politiques se diffèrent entres les PLR et les Verts-Libéraux ? Comment booster cette Entente?  Voilà des véritables questions existentielles à débattre à l’avenir.

Je me réjouis de continuer ma propre réflexion individuelle avec vous. Pour l’heure, je n’ai pas de réponses.

Soyez-gentils ! Je réfléchis de vive voix.

Accompagnez-moi !